Joaquim Rodrigo, S. M., 1961.
Tempera sur aggloméré, 97,3 x 146 cm.
Collection du Ministère de la Culture du Portugal, en dépôt au Museu Nacional de Arte Contemporânea do Chiado, Lisbonne.
Paula Rego, Repas, 1959.
Huile, graphite et collage sur toile, 95 x 112 cm.
Collection privée, Cascais.
Paula Rego, Autoportrait en rouge en rouge, 1962.
Collage et huile sur toile, 152 x 152 cm.
Museu Nacional de Arte Contemporânea do Chiado, Lisbonne.
Paula Rego, L’Exilé réveille la patrie, 1963.
Collage et technique mixte sur toile, 152 x 152 cm.
Collection de l’artiste, Londres.
L’art portugais n’a pas échappé à l’histoire de la péninsule ibérique faite d’invasions et de grandes découvertes. Il est empreint d’influences très variées et trouve sa singularité dans sa manière de réinterpréter les sources d’inspiration qui ont émaillé son histoire.
Cinq siècles avant notre ère, les lusitaniens profitent des échanges entre la cité mythique de Tartessos et les phéniciens. Les ports lusitaniens prospèrent et les apports grecs et orientaux marquent la culture. De cette époque, nous restent les dames d’Elche et de Baza, parfaites illustrations de l’esprit qui soufflait alors sur la péninsule.
Quelques siècles plus tard, la présence romaine apporte paix et stabilité sur l’Ibérie. Les camps romains deviennent une source d’inspiration majeure pour les architectes ibères.
Le christianisme qui se répand durant les premiers siècles de notre ère généralise l’utilisation de la mosaïque à tous les arts. Plus tard, les wisigoths envahissent à leur tour la péninsule et font apparaître des éléments géométriques et abstraits, des références nordiques, dans les œuvres de l’époque.
Au VIIIe siècle, la conquête musulmane fait souffler un vent nouveau sur l’art ibère. Le « mozarabisme », œuvre de chrétiens fortement pénétrés d’influences islamiques, impose une peinture éblouissante de couleur et fascinante par son étrangeté. Un style nouveau que l’on connaît surtout à travers le Commentaire sur l’Apocalypse, du moine asturien, Beatus de Liebana (776).
Au XIe siècle, un front de résistance à la présence musulmane se crée au nord, la reconquête est en marche. Les Almoravides sont chassés et le royaume du Portugal est enfin proclamé.
Le passage du roman au gothique est marqué par l’influence croissante de la France et par les contacts du Portugal avec l’Angleterre. Les lusitaniens multiplient les échanges et partent à la conquête de nouveaux territoires. Ils créent l’Utramar Portugês, un puissant empire colonial qui connaitra son apogée au XVIIIe siècle. Les Indes, le Brésil, l’or, les épices, les sources d’inspiration se multiplient. Álvaro Pires de Évora, Francisco Henriques , Jorge Afonso, Grão Vasco et Nuno Gonçalves, célèbre pour ses Panneaux de Saint Vincent, donnent alors à la peinture portugaise ses lettres de noblesse. Sur le plan architectural, le Portugal profite également de ces inspirations. Le style manuélin se caractérise par un étonnant mélange de roman, de gothique, de mauresque et de toutes les inspirations puisées au gré des grandes découvertes. Sur les monuments tels que la Tour de Belém ou le monastère des Hiéronymites, les coquillages, coraux, vagues, poissons, ancres, instruments de navigation et autres cordages se mêlent à la Croix du Christ et aux symboles royaux.
La Renaissance vient bouleverser la donne. Le classicisme antique est remis au goût du jour et les œuvres de Bramante, Raphaël et Michel-Ange illuminent le monde. Au Portugal, si la tradition de l’objectivité flamande perdure dans l’art du portrait, en architecture comme dans les arts figurés, ce sont bien les formes classiques qui deviennent la norme. Le peintre Francisco de Holanda, qui avait eu la chance de rencontrer Michel-Ange, décrit à merveille cette période dans Da Pintura Antiga (De la peinture antique) rédigé en 1548.
La réunification du Portugal et de l’Espagne par Philippe II n’y change rien. L’influence italienne est plus prégnante que jamais, comme en atteste le monastère San Vicente de Fora à Lisbonne ou les œuvres de Diogo de Contreiras.
En 1527, le sac de Rome ébranle l’idéal humaniste de la Renaissance. Les artistes au premier rang desquels on trouve le portugais Cristóvão de Morais, répondent à cet événement par le « maniérisme ». La peinture perd de sa clarté et de sa cohérence, les éléments et les plans se multiplient, les corps se déforment, leurs proportions changent et surtout on recherche le mouvement.
Au début du XVIIe siècle, les arts graphiques portugais sont exclusivement religieux. Il reste bien quelques portraitistes et adeptes de la nature morte mais l’essentiel de la production artistique du moment représente le sacré. Le bois polychrome est particulièrement prisé pour sa capacité à donner vie aux saints représentés.
Mais très vite, une évolution se fait sentir. L’architecture et la sculpture n’évoluent pas en revanche, la peinture, à l’aune du travail du flamand Rubens, fait sa révolution. Au réalisme d’hier on oppose désormais l’exubérance, l’illusion d’optique, tout ce qui peut faire appel à l’imagination. C’est le temps du baroque. Si le terme vient du portugais barroco qui signifie « perle irrégulière », le mouvement vient lui d’Italie. Il décrit « un monde où tous les contraires seraient harmonieusement possibles ».
Le XVIIIe siècle voit à son tour l’émergence d’un nouvel élan artistique. Un art « rationnel », ordonné et soumis à des règles, se répand dans un Portugal, indépendant depuis 1640. Un mouvement coïncidant avec le phénomène des Lumières qui favorisent l’ouverture des idées au néoclassicisme.
Au siècle suivant, le contact avec l’Angleterre facilite un certain éclectisme. Un mélange des styles, teinté d’une certaine fantaisie et d’une touche de nationalisme. L’architecture métallique qui fait son apparition à cette époque illustre à merveille cette capacité à assimiler les influences étrangères.
En totale opposition avec le passé, l’avant-garde fait irruption au début du XXe siècle. À Paris émergent de très fortes personnalités telles que Pablo Picasso, Breton, Klee ou Kandinsky. Amadeo de Souza-Cardoso et Helena Vieira da Silva, installés à Paris, sont les fers de lance de la scène avant-gardiste portugaise. Avec une vision des choses adaptée à leur époque, avec une nouvelle manière d’ordonner les sensations, Amadeo et Vieira découvrent des valeurs de la tradition portugaise que l’on ne trouve pas mieux respectées dans l’œuvre de leurs contemporains demeurés au Portugal. Surtout, ils donnent à la peinture portugaise et aux arts graphiques en général une dynamique que l’on peut encore observer de nos jours. Eurico Gonçalvès, José de Guimaraes, Eduardo Néry, Noronha da Costa ou encore Carlos Calvet, tous héritiers d’Amadeo et Vieira, portent haut les couleurs de l’art portugais. Un art lointain et souvent méconnu, qui doit cependant être compris et admiré comme un creuset dans lequel les apports les plus variés se sont fondus en un alliage tout à fait singulier et original.
Joaquim Rodrigo, S. M., 1961. Tempera sur aggloméré, 97,3 x 146 cm. Collection du Ministère de la Culture du Portugal, en dépôt au Museu Nacional de Arte Contemporânea do Chiado, Lisbonne.
Paula Rego, Repas, 1959. Huile, graphite et collage sur toile, 95 x 112 cm. Collection privée, Cascais.
Paula Rego, Autoportrait en rouge en rouge, 1962. Collage et huile sur toile, 152 x 152 cm. Museu Nacional de Arte Contemporânea do Chiado, Lisbonne.
Paula Rego, L’Exilé réveille la patrie, 1963. Collage et technique mixte sur toile, 152 x 152 cm. Collection de l’artiste, Londres.
L’art portugais n’a pas échappé à l’histoire de la péninsule ibérique faite d’invasions et de grandes découvertes. Il est empreint d’influences très variées et trouve sa singularité dans sa manière de réinterpréter les sources d’inspiration qui ont émaillé son histoire.
Cinq siècles avant notre ère, les lusitaniens profitent des échanges entre la cité mythique de Tartessos et les phéniciens. Les ports lusitaniens prospèrent et les apports grecs et orientaux marquent la culture. De cette époque, nous restent les dames d’Elche et de Baza, parfaites illustrations de l’esprit qui soufflait alors sur la péninsule.
Quelques siècles plus tard, la présence romaine apporte paix et stabilité sur l’Ibérie. Les camps romains deviennent une source d’inspiration majeure pour les architectes ibères.
Le christianisme qui se répand durant les premiers siècles de notre ère généralise l’utilisation de la mosaïque à tous les arts. Plus tard, les wisigoths envahissent à leur tour la péninsule et font apparaître des éléments géométriques et abstraits, des références nordiques, dans les œuvres de l’époque.
Au VIIIe siècle, la conquête musulmane fait souffler un vent nouveau sur l’art ibère. Le « mozarabisme », œuvre de chrétiens fortement pénétrés d’influences islamiques, impose une peinture éblouissante de couleur et fascinante par son étrangeté. Un style nouveau que l’on connaît surtout à travers le Commentaire sur l’Apocalypse, du moine asturien, Beatus de Liebana (776).
Au XIe siècle, un front de résistance à la présence musulmane se crée au nord, la reconquête est en marche. Les Almoravides sont chassés et le royaume du Portugal est enfin proclamé.
Le passage du roman au gothique est marqué par l’influence croissante de la France et par les contacts du Portugal avec l’Angleterre. Les lusitaniens multiplient les échanges et partent à la conquête de nouveaux territoires. Ils créent l’Utramar Portugês, un puissant empire colonial qui connaitra son apogée au XVIIIe siècle. Les Indes, le Brésil, l’or, les épices, les sources d’inspiration se multiplient. Álvaro Pires de Évora, Francisco Henriques , Jorge Afonso, Grão Vasco et Nuno Gonçalves, célèbre pour ses Panneaux de Saint Vincent, donnent alors à la peinture portugaise ses lettres de noblesse. Sur le plan architectural, le Portugal profite également de ces inspirations. Le style manuélin se caractérise par un étonnant mélange de roman, de gothique, de mauresque et de toutes les inspirations puisées au gré des grandes découvertes. Sur les monuments tels que la Tour de Belém ou le monastère des Hiéronymites, les coquillages, coraux, vagues, poissons, ancres, instruments de navigation et autres cordages se mêlent à la Croix du Christ et aux symboles royaux.
La Renaissance vient bouleverser la donne. Le classicisme antique est remis au goût du jour et les œuvres de Bramante, Raphaël et Michel-Ange illuminent le monde. Au Portugal, si la tradition de l’objectivité flamande perdure dans l’art du portrait, en architecture comme dans les arts figurés, ce sont bien les formes classiques qui deviennent la norme. Le peintre Francisco de Holanda, qui avait eu la chance de rencontrer Michel-Ange, décrit à merveille cette période dans Da Pintura Antiga (De la peinture antique) rédigé en 1548.
La réunification du Portugal et de l’Espagne par Philippe II n’y change rien. L’influence italienne est plus prégnante que jamais, comme en atteste le monastère San Vicente de Fora à Lisbonne ou les œuvres de Diogo de Contreiras.
En 1527, le sac de Rome ébranle l’idéal humaniste de la Renaissance. Les artistes au premier rang desquels on trouve le portugais Cristóvão de Morais, répondent à cet événement par le « maniérisme ». La peinture perd de sa clarté et de sa cohérence, les éléments et les plans se multiplient, les corps se déforment, leurs proportions changent et surtout on recherche le mouvement.
Au début du XVIIe siècle, les arts graphiques portugais sont exclusivement religieux. Il reste bien quelques portraitistes et adeptes de la nature morte mais l’essentiel de la production artistique du moment représente le sacré. Le bois polychrome est particulièrement prisé pour sa capacité à donner vie aux saints représentés.
Mais très vite, une évolution se fait sentir. L’architecture et la sculpture n’évoluent pas en revanche, la peinture, à l’aune du travail du flamand Rubens, fait sa révolution. Au réalisme d’hier on oppose désormais l’exubérance, l’illusion d’optique, tout ce qui peut faire appel à l’imagination. C’est le temps du baroque. Si le terme vient du portugais barroco qui signifie « perle irrégulière », le mouvement vient lui d’Italie. Il décrit « un monde où tous les contraires seraient harmonieusement possibles ».
Le XVIIIe siècle voit à son tour l’émergence d’un nouvel élan artistique. Un art « rationnel », ordonné et soumis à des règles, se répand dans un Portugal, indépendant depuis 1640. Un mouvement coïncidant avec le phénomène des Lumières qui favorisent l’ouverture des idées au néoclassicisme.
Au siècle suivant, le contact avec l’Angleterre facilite un certain éclectisme. Un mélange des styles, teinté d’une certaine fantaisie et d’une touche de nationalisme. L’architecture métallique qui fait son apparition à cette époque illustre à merveille cette capacité à assimiler les influences étrangères.
En totale opposition avec le passé, l’avant-garde fait irruption au début du XXe siècle. À Paris émergent de très fortes personnalités telles que Pablo Picasso, Breton, Klee ou Kandinsky. Amadeo de Souza-Cardoso et Helena Vieira da Silva, installés à Paris, sont les fers de lance de la scène avant-gardiste portugaise. Avec une vision des choses adaptée à leur époque, avec une nouvelle manière d’ordonner les sensations, Amadeo et Vieira découvrent des valeurs de la tradition portugaise que l’on ne trouve pas mieux respectées dans l’œuvre de leurs contemporains demeurés au Portugal. Surtout, ils donnent à la peinture portugaise et aux arts graphiques en général une dynamique que l’on peut encore observer de nos jours. Eurico Gonçalvès, José de Guimaraes, Eduardo Néry, Noronha da Costa ou encore Carlos Calvet, tous héritiers d’Amadeo et Vieira, portent haut les couleurs de l’art portugais. Un art lointain et souvent méconnu, qui doit cependant être compris et admiré comme un creuset dans lequel les apports les plus variés se sont fondus en un alliage tout à fait singulier et original.